lundi 17 février 2014

L'économie comme système et le délire déiste de nos dirigeants

Les batailles entre les écoles économiques - et les journalistes incultes - font rage !!!!
Il faut augmenter l'offre !!! Non, il faut améliorer la demande !!!
Il faut relancer la croissance par le déficit public !!!!
Il faut un pacte de responsabilité !!! Il faut diminuer les dépenses publiques !!
Il faut transférer les ressources d'état des entreprises aux ménages !!!
Il faut taxer les transactions financières.

En fait tous ces économistes ou politiques péremptoires oublient que l'économie est un système bouclé essentiellement auto-régulé. En effet si une entreprise va bien, elle paye des salariés et des fournisseurs, paye ses impôts. Le salarié pourra consommer, épargner et payer ses impôts. L'état pourra construire des infrastructures - en faisant travailler les entreprises -  permettant aux entreprises et aux individus de construire des projets et redistribuer des moyens vers les populations défavorisées. Le système est bouclé : Chiffre d'affaires - salaire - consommation - impôts - investissements, le débit d'un acteur étant le crédit d'un autre. Le système bouclé est à un point d'équilibre stable. Par exemple, si l'état augmente raisonnablement le niveau d'impôts, le système va (devrait) réagir et se stabiliser sur un autre état stable.

Ces systèmes bouclés sont étudiés par les scientifiques depuis très longtemps. Norbert Wiener vers 1942-43, sous le nom de 'cybernétique', a posé les premières pierres théoriques de leur étude. Dans les cas industriels de systèmes bouclés on sait déterminer des performances, des états, des caractéristiques globales à partir de la structure du système et de quelques paramètres de réglage. Suivant certains critères on sait même les rendre optimaux. La difficulté dans le cas d'un système économique est qu'il est extrêmement complexe, que toutes ses variables ne sont pas connues avec précision (ou seulement après observation) et qu'il dépend énormément des choix individuels. Une autre difficulté est que les expériences sont impossibles. C'est un système social basé sur des arbitrages.

Tant que les changements des paramètres sont prévisibles par les acteurs, ne sont pas trop brutaux ou ne sont pas trop proches dans le temps, le système s'adapte. Par contre si on pilote le système sans qu'il soit possible de le prévoir, par des changements violents, incompréhensibles par les acteurs ou trop rapprochés, il peut se mettre dans un état 'pathologique' bien connu des scientifiques : divergence, saturation, oscillation, extinction, chaos ... Il se peut aussi qu'un état 'défaillant' soit compliqué à quitter : par exemple la grande récession japonaise qui a duré et qui dure encore depuis plus de 20 ans.

Un exemple : Si les salaires baissent en vue d'augmenter la compétitivité de l'entreprise, le salarié va ralentir sa consommation d'où une baisse des rentrées fiscales et des chiffres d'affaires des sociétés. L'état augmente le niveau de prélèvement pour garantir ses missions. Pour rattraper la compétitivité, on pourrait diminuer encore les salaires, rentrant ainsi dans une spirale délétère menant à la récession. C'est ce qui se passe en Grèce, Espagne, Portugal et c'est ce qui menace la France.

La courbe de Laffer synthétise en partie cet état de fait. Le raisonnement (simple) est le suivant. Si l'état ne demande pas d'impôt, il n'a pas de ressources. Puis les ressources vont augmenter avec le  niveau d'impôt jusqu'au moment où cette charge étant trop forte elle obère l'activité économique. A partir de ce point, l'état a beau augmenter l'impôt, il rentre de moins en moins. Les ressources fiscales en fonction du niveau d'imposition présente donc un maximum. Plus prosaïquement : 0% d'impôts donne 0 ressources et 100% d'impôts donne 0 ressources puisque on a tué toutes les entreprises. Mathématiquement, une courbe non uniformément nulle, qui croise deux fois le zéro présente un maximum.

De plus, un des problèmes de nos sociétés est que les entreprises ont des modèles de fonctionnement basé sur la croissance. Dans un monde fini, elle doit se faire en partie les sur parts de marché des concurrents. On a donc un système bouclé qui ne doit pas être dans un état stable mais dans une croissance continue et illusoire. En théorie de systèmes on sait que si la sortie d'un système bouclé évolue toujours dans le même sens, obligatoirement elle va saturer tôt ou tard.

Dans "l'ancien temps", les économies étaient nationales et les échanges entre pays étaient limités, réglementés et régulés. Chaque pays avait à sa disposition des leviers - dont sa monnaie et le contrôle des capitaux - permettant d'influencer le point d'équilibre de son système. Bien sûr des erreurs ont été commises :  l'Argentine, Le Zimbabwé, la république de Weimar ... pour ne parler que de cas récents. En général, si "la planche à billets" est maîtrisée et si les dirigeants sont raisonnables, l'ensemble des systèmes nationaux cohabitent chacun étant sur un point d'équilibre.

La théorie Keynésienne (pour ce qu'en dit sa vulgarisation) stipule que quand une économie va mal il faut la relancer par l'investissement au prix de l'augmentation de la dette mais qu'il faut absolument la combler quand l'économie va bien. En théorie des systèmes c'est l'équivalent de disposer d'un réservoir dans lequel on vas prélever en cas de besoin et restituer en cas de surplus (c'est le condensateur de lissage dans l'alimentation stabilisée de vos ordinateurs par exemple). Par contre, la théorie nous dit que la valeur moyenne de ce réservoir doit être constante sinon il peut se passer des choses bizarres. Dans les pays modernes (je dirai économiquement barbares) la niveau de dette croit sans arrêt....

La mondialisation a interconnecté tous ces systèmes économiques nationaux, rendant leur contrôle quasiment impossible. Par exemple, une décision monétaire à New-York peut déstabiliser les économies émergentes sans qu'ont ait pou le prévoir. Seule l'observation, a posteriori, permet de le constater. Rien ne dit que ce système global n'est pas chaotique, ne possède pas un attracteur vers l'activité nulle. Rien ne dit que le point stable ne sera pas atteint quand une économie nationale sera détruite.

Nos politiques, conseillés par des économistes en peau de lapin, sont des apprentis sorciers qui se prennent pour des Dieux infaillibles et qui pensent piloter un système qui les dépasse. Dans l'industrie, en pratique, on essaye de découper les systèmes en partie plus petites pour assurer une "pilotabilité" de
l'ensemble. En politique, les acteurs font tout le copntraire : GATT puis OMC, UE, TAFTA, ALENA ...

Je ne sais pas si les formations en économie enseignent la théorie "cybernétique" (ce terme est passé de mode et on parle plus facilement d'automatisme ou de "contrôle de systèmes" ou encore "systémique"). Je crois que nos économistes - et les journalistes veulent en parler - devraient passer quelques heures dans nos écoles d'ingénieurs pour revoir des bases objectives dans ce domaine. De plus les approches modernes de l'économie mêlent l'automatisme (systémique) et la thermodynamique irréversible avec des notions comme l'exergie. Qui des économistes qui dorment dans les sous-sols aménagés des chaînes de télévision peuvent nous en parler sérieusement ?

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